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Le financement des transports publics: le cas lyonnais

Le projet de Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) Trévoux-Sathonay-Lyon (porté par la Région Auvergne-Rhône-Alpes en partenariat avec la Métropole de Lyon et la SNCF) vise à offrir une liaison directe entre Trévoux et Lyon en moins d’1 heure, et à décongestionner le Val de Saône, dont les axes de circulation sont saturés.

Crédit photo Le projet de Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) Trévoux-Sathonay-Lyon (porté par la Région Auvergne-Rhône-Alpes en partenariat avec la Métropole de Lyon et la SNCF) vise à offrir une liaison directe entre Trévoux et Lyon en moins d’1 heure, et à décongestionner le Val de Saône, dont les axes de circulation sont saturés.

Il y a 376 communes desservies par des transports totalement gratuits, une quarantaine de réseaux ; mais le passage à la gratuité de Montpellier change-t-il la donne? Est-il le signe d’une évolution vers la gratuité ? Pour essayer de comprendre les évolutions en cours, le cas lyonnais est particulièrement instructif.

Il y avait, jusqu’à peu, un relatif consensus sur le véritable verrou à lever pour les transports publics - leur fréquence et, si on veut aussi, leur praticité : en effet, 71 % des Français déclaraient en 2018 prendre les transports publics pour cette raison principalement, tandis que 41 % les utilisaient afin de faire des économies.

La gratuité?

Les transports publics sont le fruit d’une politique publique. La part que prend la politique, dans l’organisation et le développement des transports, est par conséquent importante. Il en va sans doute ainsi de la gratuité. Il y a 376 communes desservies par des transports totalement gratuits, une quarantaine de réseaux; mais le passage à la gratuité de Montpellier change-t-il la donne? 

Pour des réseaux de taille relativement modeste, une mesure comme la gratuité des transports était comprise (et même admise), mais pas pour les grands réseaux qui ont besoin, pour leur développement, de recettes de trafic. C’est ce que Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon et de SYTRAL Mobilités, rappelle à chaque fois qu’il en a l’occasion. Ce qui ne l’empêche pas, par ailleurs, de rappeler que les autorités organisatrices de la mobilité ont besoin de plus de moyens, en évoquant un déplafonnement du versement mobilité ou une baisse de la TVA sur les transports publics, des mesures auxquelles s’est jusqu’à présent refusé le gouvernement. « La gratuité des transports en commun est très souvent présentée comme « une évidence » pour accompagner, dit-il, la transition écologique et répondre aux nombreux enjeux auxquels nous devons faire face: changement climatique, transition énergétique, mise en place des ZFE-m.

Mais voilà, l’élu juge cette mesure éminemment politique « inopportune » à la fois pour répondre aux enjeux écologiques et enjeux sociaux, contrairement à la « gratuité ciblée » pour les plus modestes, tandis que le SYTRAL pratique par ailleurs une tarification sociale. Pour asseoir sa démonstration, il part des dépenses - de ce que coûtent les transports en commun mis en place sur son territoire, un réseau parmi les plus performants et, de fait, si on peut dire, un réseau qui a aussi toujours su laisser à la tarification un rôle non négligeable, parmi les plus exigeantes vis-à-vis des usagers. Les investissements y ont doublé (2,5 milliards d’euros)…mais la gratuité pour les plus pauvres, tarif « solidaire » à 10,5 euros pour les personnes les plus vulnérables, baisse du prix de l’abonnement pour les plus jeunes et création du ticket famille.

Côté recettes, elles se décomposent de la façon suivante: le versement mobilité y tient sans surprise la première place (48%), la contribution versée de manière complémentaire par les collectivités arrivent juste après (23%), la billettique en troisième et dernière position (29%, le reliquat provenant de la publicité, à hauteur de 0,5%). Parmi les mesures notables, on citera une hausse plus que substantielle de la contribution de la seule Métropole (+50%), et d’une hausse du taux de versement mobilité à 2% (soit au taux maximum autorisé par la loi).

L’AOM a fait baisser la contribution générale des usagers, et limiter la hausse de 2023 en dessous du niveau de l’inflation, malgré une crise énergétique qui s’est ressentie sur les finances de la collectivité.

Des recettes pourquoi faire ?

C’est sans doute le point principal de l’argumentation. Les autres relèvent plutôt de la rubrique des effets pervers qu’il faut éviter. Si la gratuité a été écartée, c’est parce qu’elle serait, au fond, contreproductive, même si, Bruno Bernard n’en appelle pas moins à l’Etat, puisque les recettes de trafic ne peuvent plus augmenter de manière suffisante et qu’il faut tenir compte de l’inflation. Il faut en effet financer 3 lignes de tramways, 2 nouvelles stations de métro pour la ligne B, une nouvelle ligne de BHNS, ainsi que l’achat de 400 nouveaux bus bas-carbone et 35 nouvelles rames de tramway. Ce déploiement inédit est naturellement coûteux. A eux seuls, le BHNS coûte environ 150 millions d’euros, loin derrière toutefois un métro qui lui coûtera plus d’un milliard… Le calcul est vite fait, si on peut dire.

La gratuité généralisée, en lieu et place d’une gratuité ciblée que pratique d’ailleurs probablement toutes les AOM, coûterait environ 250 millions d’euros/an, soit 1,5 milliard sur la totalité d’un mandat. Une somme qui correspond aux recettes de billettique et des abonnements du réseau TCL. Or, les deux leviers de financement que sont les contributions des collectivités et le montant du versement mobilité sont à leur maximum. Adopter une mesure de gratuité généralisée reviendrait à mettre un coup d’arrêt aux investissements, faute d’autres leviers de financement existants.

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Lors du dernier conseil d’administration de 2023, alors qu’étaient présentées les perspectives pour 2024, Bruno Bernard a en effet tenu à rappeler un fait. « Les autorités organisatrices de mobilité ont besoin de nouveaux financements pour poursuivre le développement de leurs réseaux. De nombreuses propositions trans-partisanes, portées par l’ensemble des grandes agglomérations françaises, ont été faites au gouvernement comme le déplafonnement du Versement Mobilité (VM) ou la baisse de la TVA sur les transports publics. Seule la région parisienne a eu la possibilité d’avoir des nouvelles recettes ». Et le président de la Métropole de Lyon et de SYTRAL Mobilités d’ajouter : « Nous demandons au gouvernement d’apporter des réponses à l’ensemble de nos territoires pour offrir à tous les Français une meilleure offre de transport en commun. C’est une nécessité pour lutter contre le réchauffement climatique, améliorer la qualité de l’air et le pouvoir d’achat de nos concitoyens »

«Pour continuer à améliorer nos réseaux, nous sommes contraints de réviser à la hausse les tarifs de certains tickets et abonnements. Toutefois cela se fera à un niveau inférieur à celui de l’inflation », a-t-il annoncé, avant d’ajouter « Cette hausse n’impactera pas les abonnements de 4 à 10 ans et les jeunes de 18 à 25 ans. Ce qui représente avec les bénéficiaires de la gratuité près de 40% des 500 000 abonnés qui ne verront pas leur abonnement augmenter » avant d’ajouter : « Par ailleurs le ticket unitaire ne sera pas augmenté » (Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon et de SYTRAL Mobilités).

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Le coût n’est pas le principal frein à la transition des mobilités

Au rang des effets indésirables d’une éventuelle gratuité (est-elle demandée localement ?), Bruno Bernard indique une hausse mécanique de la fréquentation d’un réseau qu’il juge par ailleurs « déjà saturé »; aussi une baisse de la marche à pied ou de la pratique du vélo dans une métropole où près de 38 millions de déplacements à vélo ont été comptabilisés en 2021 (Soit une hausse de 21% par rapport à 2020) et pour l’usage duquel les ambitions sont clairement affichées à la hausse: l’objectif d'ici 2026 est d’en multiplier la pratique par trois.

Le coût n’est pas le principal frein à la transition des mobilités, sinon cela se vérifierait avec la voiture particulière (même si son coût réel est bien supérieur à celui « ressenti »). Selon les données de l’ADEME, le coût de la voiture serait en moyenne de 3000 euros par an, assurance comprise). « Notre abonnement le plus cher, souligne Bruno Bernard, est déjà 73% moins cher qu’une voiture (pour les abonnements « jeunes », c’est 90%). L’élu ne nie pas que le coût demeure, pour certaines catégories de nos concitoyens, un frein, mais il souligne qu’une tarification sociale ciblée permet de le lever, d’autant que beaucoup d’usagers ont une vision faussée de la répartition des coûts des abonnements de transports en commun (seuls 3,5 % des usagers sont titulaires d’un abonnement sans participation de l’employeur public ou privé). Et d’enfoncer le clou « La gratuité d’un réseau n’apporte pas grand-chose à une personne modeste si la ligne de bus, la ligne de tramway n’existe pas ou si sa ligne est saturée ».

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De la politique tout de même

Souhaiter maintenir un niveau de recettes de trafic convenable, n’empêche pas la prise en considération d’éléments de justice sociale. De fait, cela revient à la modérer «Pour continuer à améliorer nos réseaux, nous sommes contraints de réviser à la hausse les tarifs de certains tickets et abonnements. Toutefois cela se fera à un niveau inférieur à celui de l’inflation », a annoncé Bruno Bernard, avant d’ajouter « Cette hausse n’impactera pas les abonnements de 4 à 10 ans et les jeunes de 18 à 25 ans. Ce qui représente avec les bénéficiaires de la gratuité près de 40% des 500 000 abonnés qui ne verront pas leur abonnement augmenter » et de conclure : « Par ailleurs le ticket unitaire ne sera pas augmenté »

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La vraie alternative est entre une gratuité généralisée et une gratuité ciblée.

Autrement dit entre une gratuité qui se traduira inévitablement par des investissements moindres et une politique tarifaire qui permet de développer les transports en commun, inclue pour cela une tarification zéro, mais dans des cas très particuliers. Une alternative que la Métropole de Montpellier à écarter. La mesure de gratuité y a été généralisée le 21 décembre et ceci, clairement, au nom de l’égalité (le slogan « l’égalité, ça n’a pas de prix, bus et tram gratuits » est suffisamment clair). Montpellier Méditerranée Métropole est ainsi devenue la plus grande métropole européenne à instaurer la gratuité des transports en commun pour tous ses habitants.

Michaël Delafosse souhaite faire de Montpellier « un territoire exemplaire de la transition écologique et solidaire, un territoire qui prend soin de ses habitants, pour montrer qu’un autre modèle est possible ». Autre ambition affichée.

Lire les habitants de la métropole de Montpellier, les bus et les trams deviennent gratuits.

L’idée de la gratuité n’est pas nouvelle : une quarantaine de collectivités ont déjà adopté une telle mesure, à l’instar de Niort, Châteauroux, Calais ou encore Dunkerque, qui fait figure d’exemple. La nouveauté de la mesure adoptée à Montpellier réside dans l’importance du réseau : avec les quelque 500 000 personnes concernées, Montpellier sera la plus grande métropole européenne à proposer un tel service grandeur nature, après la capitale estonienne de Tallinn.

 

 

 

Auteur

  • Eric RITTER
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